Ce jour-là, mon fils vient s’asseoir à côté de moi. Il me regarde, sans détour : « Maman, comment tu vas ? »
Puis, il enchaîne : « Moi, je ne veux pas d’enfant. »
Je lui réponds tranquillement qu’il a le droit de ne pas en vouloir.
Il réfléchit deux secondes, puis me balance : « Mais quand même, c’est chiant, non ? »
Je n’ai pas esquivé. J’ai dit la vérité.
Oui, c’est prenant. Éreintant, parfois. On répète sans cesse les mêmes choses. On cadre, on recadre. On explique, on reformule. On fatigue. On est tenus de rester debout, même quand on aimerait fuir. Mais c’est ça, être parent.
Parce qu’élever un enfant, ce n’est pas lui dire oui tout le temps. Ce n’est pas lui faire plaisir. Ce n’est pas l’endormir dans un confort passager. C’est poser des limites qui le rendent capable de vivre avec les autres, de penser par lui-même, de construire.
Je ne lui ai pas vendu de rêve. Je lui ai dit que c’est une responsabilité. Que c’est un acte engagé. Que ce n’est pas un rôle de figurant. Il a écouté.
Et je lui ai aussi dit l’autre versant : ces moments de rire à la volée, ces regards complices, cette fierté silencieuse quand il grandit sous nos yeux. Je lui ai parlé de la tendresse qui vient entre deux tempêtes. De la douceur qui surgit, là, sans prévenir. De ces instants qui suspendent le temps.
Ce n’est pas un conte de fées. Ce n’est pas non plus un sacrifice. C’est un chemin. Et comme tout chemin, il demande de marcher.
Dans la nature, rien ne pousse sans résistance. Un arbre a besoin de vent pour renforcer ses racines. Un oiseau ne peut voler sans tomber d’abord. Nos enfants, eux aussi, ont besoin qu’on leur oppose un cadre solide pour qu’ils puissent s’en servir comme tremplin. Pas pour les brider. Pour les lancer.
Alors non, ce n’est pas toujours simple. Et heureusement. Sinon, on ne se poserait pas toutes ces questions.
Et s’il ne veut pas d’enfants ? C’est son choix. L’important, c’est qu’il comprenne que la relation humaine, qu’elle soit parentale ou pas, demande une présence, une exigence, une écoute. Et surtout, une capacité à aimer sans se perdre.
C’est tout cela que je voulais lui transmettre, sans le lui imposer.
C’est ça, pour moi, éduquer : pas lui donner envie d’avoir des enfants. Juste lui montrer que ce lien-là, quand il est vivant, vrai, et aligné, transforme.
Pas besoin de le romantiser. Il suffit de le vivre en conscience.
Et puis, j’ai envie de dire quelque chose de plus large : on n’éduque plus. On donne un écran. On évite le conflit. On se perd dans une quête de paix immédiate, alors que l’éducation est un art du long terme. On a confondu amour et permissivité. On a confondu autorité et autoritarisme. On a oublié que les enfants ont besoin de repères clairs, pas de négociations permanentes.
Les enseignants deviennent des boucs émissaires de ce que les familles n’assument plus. Les enfants sont surstimulés mais sous-guidés. Et l’on s’étonne qu’ils soient perdus.
Rééduquer l’éducation, c’est commencer par se regarder soi-même. C’est être capable de dire non, d’expliquer pourquoi, de tenir une ligne droite même si elle est inconfortable. Ce n’est pas à l’enfant de s’adapter à nos humeurs. C’est à nous de poser des fondations solides.
Sinon, on ne construit rien. Ou alors du sable.
Et plus tard, ce sable s’effondre. En avoir conscience est déjà un premier pas.
Il faut aussi accepter que personne n'est parfait, à commencer par nous-même. On peut faire du mieux qu'on peut, c'est déjà énorme, et ça ne veut pas dire qu'on ne fera pas d'erreurs.
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